Entre les vignes de Pierrefeu, les pinèdes du Revest-les-Eaux et les hauteurs de Hyères, le rêve de bâtir « sa » bastide provençale reste vivace. Mais combien cela coûte-t-il vraiment ? Doit-on partir d’une vieille bergerie à rafraîchir ou lever un pavillon tout neuf ? Et surtout : où se niche le principal défi du chantier ? Tour d’horizon – chiffres à jour, conseils terrain, et retour d’expérience de maîtres d’ouvrage locaux.

1. Le ticket d’entrée : le terrain

Même loin du littoral, le foncier reste tendu :

SecteurMoyenne 2025 (terrain viabilisé)Fourchette haute / basse
Colline de Costebelle (Hyères, 10 km mer)775 €/m²321 à 1 065 €/m² 
Le Revest-les-Eaux et vallées toulonnaises419 €/m²342 à 508 €/m² 
Plaine de Solliès-Pont, Carnoules, Vidauban300 €/m²138 à 450 €/m² 

Repère concret : une parcelle de 600 m² « bien placée » autour du Revest se négocie autour de 250 000 € frais de notaire inclus ; plus près de Hyères, la même surface tutoie 350 000 €.

2. Combien coûte la construction neuve en 2025 ?

La RE2020 (seuils CO₂ durcis début 2025) a renchéri l’enveloppe de 5 à 10 %. Les professionnels locaux annoncent :

  • Parpaing enduit, prestations « familiales » : 1 600 – 1 800 €/m².
  • Brique et isolation renforcée : 1 800 – 2 000 €/m².
  • Architecte + matériaux nobles (bois, pierre, domotique) : 2 200 – 2 800 €/m².

Pour une villa de 110 m² clé en main, la facture travaux brute varie donc de 175 000 à 300 000 €. Ajoutez 20 à 25 % pour les « coûts invisibles » : viabilisation (15 000–25 000 €), étude de sol G2 (1 200 €), taxes d’aménagement (8 000–14 000 €), dommage-ouvrage (4 000 €) et honoraires éventuels (8 % si architecte).

3. Le plus grand challenge : la maîtrise du calendrier… et du climat

Contrairement aux idées reçues, ce n’est pas tant le coût des matériaux qui fait déraper les budgets que les retards. Dans le Var, trois facteurs les provoquent :

  1. La pression administrative : demandes de permis sur des zones classées, forêts à risque incendie (zone rouge PPRIF), exigences RE2020. Un aller-retour manqué avec le service urbanisme peut ajouter 4 – 6 semaines.
  2. La météo méditerranéenne : deux ou trois épisodes cévenols peuvent bloquer terrassement et maçonnerie un mois entier.
  3. La tension sur la main-d’œuvre : les maçons et couvreurs locaux ont plus de chantiers que de bras de septembre à juin ; louper son créneau, c’est repousser le second œuvre d’une saison.

Conseil de pros : verrouiller un planning contractuel avec pénalités dès l’appel d’offres, et prévoir un fond de roulement couvrant trois mois de loyer ou remboursement d’emprunt « pour rien » – c’est ce coussin qui, psychologiquement, évite de bâcler les finitions quand le chantier s’éternise.

4. Les erreurs classiques à éviter

ErreurImpactRemède
Sous-dimensionner les VRD (drainage, fosses, réseaux)Infiltrations, frais supplémentairesDemander un plan de maison 2d incluant pente, fossé et chemin d’accès afin d’estimer les mètres linéaires exacts.
Choisir un constructeur « hors zone »Surcoût déplacement + méconnaissance des exigences PPRIFPrivilégier les artisans basés dans le 83 ou 13 habitués aux dossiers incendie.
Négliger l’argile gonflanteFissures, sinistres décennauxÉtude de sol G2AVP obligatoire + fondations adaptées (puits, radier).
Se fier aux promesses oralementSurcoûts non budgétésRédiger des avenants chiffrés pour chaque modification, même minime.

5. Rénovation d’une vieille bâtisse vs construction neuve

CritèreVieille maison à retaperConstruction neuve
Ticket d’entrée200 000 € (maison 90 m² « dans son jus ») + frais notaire réduitsTerrain nu 250 000 € + frais notaire pleins
Travaux typiquesToiture, isolation, électricité, fosse septique ≈ 1 200 €/m²Gros œuvre + second œuvre ≈ 1 800 €/m²
Temps de chantier12–18 mois (phases surprises)10–14 mois (processus linéaire)
Aides fiscalesMaPrimeRénov’, TVA 5,5 % sur l’isolationPrêt à taux zéro, frais de notaire réduits sur terrain si lotissement communal
Valeur patrimonialeCachet, murs en pierre, plafonds voûtésConformité RE2020, zéro amiante
RisquesPlomb, termites, plancher pourri, surcoûts cachésRetards administratifs, aléas foncier

Comment trancher ?

  • Vous adorez le charme authentique : une bastide XIXᵉ au Luc, à 220 000 €, paraîtra imbattable. Mais comptez 100 000 – 140 000 € d’isolation et de mises aux normes si vous voulez la louer un jour.
  • Vous visez la performance énergétique et la revente rapide : le neuf certifié A ou B attire les familles et la clientèle de location saisonnière, avec une décote très faible sur dix ans.
  • Budget serré mais bonnes compétences en travaux : un semi-hors d’eau/hors d’air acheté au promoteur et que vous finissez vous-même peut être la passerelle idéale.

6. Deux budgets-scénarios 2025

Poste« Retaper » de 110 m² à Solliès« Construire » 110 m² au Revest
Achat bâti / terrain280 000 €252 000 €
Rénovation / Construction132 000 € (1 200 €/m²)209 000 € (1 900 €/m²)
Aléas + imprévus20 000 €15 000 €
Taxes / DO / étude sol12 000 €28 000 €
Total clé en main444 000 €504 000 €

On voit qu’à surface égale, la rénovation peut sembler 10 – 15 % moins chère… si et seulement si l’état des planchers et de la toiture ne réserve pas de mauvaise surprise. La moindre charpente à changer (25 000 €) ou dalle à refaire (15 000 €) gomme l’écart.

7. Trois leviers pour maîtriser le budget

  1. Foncier stratégique : un terrain légèrement pentu sud-ouest offre drainage naturel et gain thermique ; il réduit terrassement et chauffage.
  2. Monoprix des surfaces vitrées : limiter les baies plein nord et garder un ratio ouvertures/mur de 1:6 épargne jusqu’à 8 % sur la facture menuiserie.
  3. Autoconstruction partielle : gérer peinture, cuisine et paysagisme soi-même fait économiser 150–200 €/m², à condition d’avoir du temps (et de bons amis le week-end).

8. Conclusion : un projet rentable si l’on pense « global »

En 2025, tabler sur 500 000 € pour une maison familiale de 100 – 110 m² terrain inclus dans l’arrière-pays varois est réaliste, rénovation comprise. Le plus grand défi n’est pas tant l’argent que la synchronisation : anticiper permis, météo, artisans et cash-flow. Le neuf garantit des performances et une tranquillité décennale ; l’ancien offre le charme et parfois une économie de foncier. Dans les deux cas, la clé reste la même : un diagnostic précis, un planning serré, et l’acceptation qu’en Provence, on construit « au rythme du chant des cigales… mais avec la rigueur d’un métronome ».